Les pertubateurs endocriniens

Le billet de Claire

Mais à quoi joue Bruxelles ?

Les perturbateurs endocriniens (PE)
Ce sont ces produits chimiques (bisphenol A, par exemple) présents dans les pesticides mais aussi dans des centaines d’objets : plastiques, cosmétiques, détergents, etc. Ils passent dans le sang perturbant le système endocrinien en particulier chez les fœtus, déclenchant des cancers à l’âge adulte ou des malformations des organes génitaux.
En février 2009, le Parlement européen décide de les interdire, que s’est-il passé pour que rien n’ait changé ?

 

Le rapport
En février 2013, le Dr Andreas Kortenkamp, qui dirige le centre de toxicologie de l’Université de Londres, spécialiste des PE, remet son rapport de mission à la Commission européenne. Il mentionne les centaines d’études menées depuis 1990 sur l’effet nocif des PE sur la santé et l’urgence qu’il y a à les interdire.

 

La définition
En juin 2013, le Parlement européen souhaite une définition des PE car de nombreux produits industriels sont concernés et cela aura un coût.

 

Les intervenants à Bruxelles
Le CEFIC (Conseil européen de l’industrie chimique).
La Commission et les États membres sont représentés par des directions générales. La Direction générale de la santé et des consommateurs (DG Sanco) donne mission à la DG Environnement de trouver une définition aux PE, ce qui est difficile en raison de la diversité de ces derniers. L’industrie va alors intervenir pour instaurer ce qu’on appelle « la manufacture du doute » déjà pratiquée pour le tabac. Créer le doute sur le rapport Kortenkamp et le traiter de junk science (science poubelle, pseudo-science). Ainsi les politiques sont influencés, trompés et le processus démocratique est enrayé.

 

Le principe de précaution : premier sujet de discorde
Il est la seule solution au problème posé par les PE, car ces derniers menacent la santé humaine à long terme. Il est impensable que l’humanité serve de cobaye et soit exposée à des risques trop longtemps pour prouver les effets des PE, car les effets nocifs apparaissent à l’âge adulte.
Ce principe est fortement combattu par l’industrie bien qu’il soit porteur d’alternatives, d’innovation et donc de progrès.

 

Le seuil de nuisance : deuxième sujet d’affrontement avec l’industrie
Le Règlement sur l'enregistrement, l'évaluation, l'autorisation et les restrictions des substances chimiques (REACH) fixe les seuils de nocivité des produits chimiques. Il a permis de retirer certains pesticides du marché européen mais les PE sont difficiles à évaluer car il s’agit d’actions hormonales.
Si la Commission décide de ne pas accorder le seuil, tous les PE pourraient disparaître, l’industrie veut donc un seuil maximal.
L’Allemagne et la Grande-Bretagne fortes pourvoyeuses en pesticides vont donc peser sur les décisions politiques

En juin 2013, la DG Sanco a demandé son avis à l’Agence européenne de sécurité alimentaire  (AESA). Cette dernière a penché en faveur de l’industrie.
Fin 2013, la Commission a bloqué tout le processus et demandé une enquête d’impact sur les PE.
Une telle étude est impensable. Comment évaluer les coûts et bénéfices d’un problème de santé publique ?
Le 6 juin 2013, les industries du plastique et des pesticides ont attaqué le rapport Kortenkamp par le biais de scientifiques proches de l’industrie ; il y a donc conflit d’intérêts.
La DG Commerce invoque à son tour la misère de l’agriculture privée de pesticides (30 % de pertes pour le blé).

 

Février 2014
La Commission européenne, en la personne d’un expert scientifique auprès de Barroso, son président, a décidé seule que l’étude d’impact aurait lieu mais quand ? mystère !

L’Europe n’a donc toujours pas de définition des PE.
Le souhait du Parlement est jeté aux ordures. 
Pourtant l’ampleur du problème de santé posé par les perturbateurs hormonaux est grave

Le Parlement européen gagnera-t-il la bataille pour une vie meilleure ?